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Rencontre autour des vergers hautes tiges

Rencontre autour des vergers hautes tiges – Mise au point sur les challenges logistiques et de communication.

Le 28 août, l’association belge Diversifruits qui milite pour la plantation de prés vergers hautes tiges tenait son assemblée générale à Rossignol, au Parc Naturel de Gaume. Le 29 août, des membres de l’association ainsi que quelques passionnés des variétés anciennes de fruits sont venus visiter les 13 has de verger plantés à quelques kms d’Orval, sur la commune de Breux (France), l’occasion de discuter variétés mais surtout de la filière de commercialisation à mettre en place pour valoriser ces fruits pour la plupart inconnus des consommateurs.

Aujourd’hui, les pommes proposées aux consommateurs sont majoritairement issues d’une dizaine de variétés (Golden, Pink Lady, Gala, Granny Smith….) cultivées dans des vergers industriels basses tiges, à force d’engrais et de pesticides. Les anciennes variétés qui faisaient la richesse de nos vergers disparaissent et les arbres anciens ne sont plus entretenus. C’est une perte de diversité génétique alarmante.

En Belgique, l’association Diversifruits et le CRWA (Centre Régional Wallon de l’Agriculture) ont pris à bras le corps cette problématique, et depuis quelques années, un vaste programme de replantation des ces anciennes variétés a été mis en place. En France, les initiatives de ce type sont très timides : manque d’intérêt des agriculteurs, pas d’arbres disponibles en pépinières. Dans notre région du Nord Meusien, nous sommes un cas unique, avec ces 22 has plantés de plus ou moins 90 variétés anciennes de poires et pommes.

Les bienfaits  de ces vergers sont pourtant multiples : la sauvegarde d’une biodiversité fruitière, la protection et la multiplication des puits de carbone, un refuge de biodiversité pour la faune et la flore, la production d’une arboriculture durable ayant une empreinte carbone positive, la réduction des gaz à effet de serre par le développement d’un commerce de fruits locaux en circuit court, le développement d’une alimentation saine et naturelle, la restauration d’un patrimoine ayant une force de cohésion sociale surprenante ainsi que la création d’emplois locaux. Et j’en suis convaincu, une voie de diversification pour l’agriculture.

 

Les premiers vergers plantés entrent tout doucement en production. Il faut se poser dès à présent la question de la commercialisation de ces fruits. La multiplicité des variétés rend l’exercice difficile. En effet, l’éducation,  la formation des consommateurs et la communication à propos des usages de ces fruits sont essentielles. Les fruits ayant des dates de maturité différentes et des usages différents (pommes à couteaux, pommes à jus, pommes à cidres, conservation courte ou longue, fruits pour la cuisson….), il va falloir mettre au point un système de communication en rayon.

Également, la commercialisation en circuit court est une bonne idée, mais lorsque les tonnages vont devenir important, il va falloir trouver des solutions pour travailler ensemble et assurer les circuits logistiques. On ne pourra écouler tous ces fruits au niveau local. Les coûts logistiques sont une donnée essentielle pour assurer la rentabilité de nos activités.

D’autre part, il est impossible que chaque producteur développe sa propre marque, par exemple au niveau des jus. Cela ne fait qu’attiser une concurrence entre producteurs, qui vont mener une guerre économique pour trouver des emplacements en rayon. Il serait préférable, de mon humble avis, de développer une marque forte, gérée par des associations de producteurs (coopérative ???). Il faut des moyens marketing pour assurer une visibilité sur le marché. Je constate déjà au niveau très local un développement important de marques de jus de pommes, avec des prix à la baisse. Ce qui va faire le jeu de la grande distribution, dont on ne pourra pourtant pas se passer pour commercialiser des tonnages importants. De part mon métier, je constate très souvent que les producteurs sont toujours d’accord d’investir dans du matériel, mais que les aspects marketing et les coûts qu’ils engendrent sont laissés pour « moins que rien ». C’est une grave erreur de méthodologie.

J’appelle de tous mes vœux les producteurs à relever ce challenge, et à se structurer au niveau logistique et communication. Sans quoi, il va y avoir pas mal de déçus et ce projet ne survivra pas.

 

Thierry Heins