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Le verger de plein vent, une voie de diversification agricole – Compte rendu d’une journée d’échange sur le sujet, organisée par le Groupement des agriculteurs bio du Grand Est.

A la demande du Groupement des agriculteurs bio du Grand Est, il m’a été demandé d’intervenir comme orateur lors d’une formation sur l’intérêt des vergers de plein vent comme source de diversification agricole.

Cette journée d’échange s’est tenue à Breux, dans le Nord Meusien le 11 février dernier.

Cette formation avait pour but de parcourir tous les points techniques de la conduite d’un verger de plein vent, mais aussi sa rentabilité économique, les aides potentielles à la plantation, ainsi que les défis à relever pour mener à bien un programme de plantation à plus grande échelle : développement d’une filière de pépiniériste pour fournir les plants, et d’une filière de commercialisation pour valoriser ces fruits. Après une longue matinée de discussion sur ces différents points, nous avons visité deux vergers situés à proximité, à savoir un jeune verger de 13 has plantés en haute tiges de variétés anciennes de pommes et poires (1300 arbres), et un très vieux verger restauré de pommiers de plus de 80 ans.

Le verger haute tige est un ensemble d’arbres dont les couronnes sont portées par des porte-greffes vigoureux (franc de pied). Les racines de ces arbres explorent les sols en plus grande profondeur, et produisent des fruits ayant une réelle qualité différenciée répondant mieux aux enjeux de demain. Jusqu’à la moitié du 20ème siècle, ces vergers de plein vent constituaient pour chaque village une ressource essentielle en fruits et formaient des ceintures vertes autour des villages, contribuant ainsi au patrimoine naturel et paysager. Ces vergers constituaient un réservoir de biodiversité fruitière alors qu’aujourd’hui une dizaine de variété de pommes constitue 80% de l’offre mondiale.

Le verger haute tige est une forme de culture fruitière en voie de disparition : mutation de l’agriculture et hyperspécialisation, exode rural et manque de main d’œuvre, remembrement et urbanisation, arrachage soutenu par des aides… Mais différentes initiatives tentent de remettre à l’honneur ce type de conduite, en réintroduisant par la même occasion ces anciennes variétés fruitières en voie de disparition.

Ces vergers présentent de multiples atouts :

  • Séquestration du dioxyde de carbone ;
  • Structuration du paysage ;
  • Lieu de refuge pour la faune sauvage et les auxiliaires de culture ;
  • Amélioration de la qualité des sols et de l’infiltration des eaux de pluie dans les sols ;
  • Richesse variétale adaptée aux contextes locaux – anciennes variétés locales & régionales ;
  • Haute qualité gustative et nutritionnelle des fruits produits ;
  • Multiplicité des usages (jus, cidre, vinaigre, eau de vie, compote, sirop, gelée, fruits cuits, fruits séchés, fruits de table etc.) ;
  • Diversification agricole et valorisation économique, pour deux à trois générations, au vu de la très grande longévité de ces arbres.

 

Cette journée fut fructueuse en échanges. Planter des vergers HT est un pari pour l’avenir. Les quelques candidats qui s’étaient déplacés pour la journée sont d’horizons divers. Certains sont des grands céréaliers convertis au bio, d’autres des jeunes qui souhaitent apporter cette source de diversification à leur exploitation pour différentes raisons, ….

L’une des problématiques est de stimuler les pépiniéristes à produire ces arbres. Actuellement, l’offre est insuffisante. De nouvelles règles obligeant les agriculteurs bio à se fournir en plants bio à partir du 1er janvier 2022 risquent de compliquer la donne. D’autre part, il ne suffit pas de planter et de produire des fruits, dès à présent il faut réfléchir à se structurer pour pouvoir valoriser convenablement ces fruits uniques, qui n’existent pas sur le marché. La communication, l’éducation et le marketing ne doivent pas être négligés. C’est souvent un point faible du monde agricole.

Thierry Heins – Avec le soutien de la Région Grand Est, le GAB Grand Est et le fond de formation pour la formation des Entrepreneurs du Vivant VIVEA