Actualités

Le gui, fléau de nos vergers

Tout le monde connaît bien sur le gui, cette plante traditionnellement utilisée pour les décorations de Noël. En hiver, les boules de gui sont particulièrement visibles sur les arbres dénudés, et c’est à ce moment que l’on constate le caractère particulièrement invasif de cette plante parasite, ou plutôt devrait-on dire, de cette plante hémiparasite.

Dans nos régions, le gui parasite très fréquemment les pommiers et  les peupliers mais on le retrouve aussi sur les aubépines, sorbiers, tilleuls et, dans une moindre mesure, saules, érables et Robinier. Il parasite plus rarement les poiriers, cerisiers, noisetiers, frêne…bien que j’ai pu observer dans le Nord Meusien de très  vieux poiriers totalement envahi par le gui.

Auparavant la lutte contre le gui était obligatoire, mais le texte a  été abrogé au début des années 1980 et remplacé par l’annexe B de l’arrêté du 31/07/2000 modifié établissant la liste des organismes nuisibles aux végétaux soumis à  des mesures de lutte obligatoire. Cela signifie que leur lutte n’est pas obligatoire sur tout le territoire et de façon permanente mais peut l’être rendue par arrêté ministériel et/ou préfectoral précisant les aires géographiques, les périodes et les modalités de lutte. Aucun arrêté préfectoral n’existe en Lorraine.

Le gui, une plante hémiparasite

Le gui est donc une plante hémiparasite, c’est-à-dire qu’il siphonne la sève brute (eau et sels minéraux) de l’arbre qui le porte mais il se débrouille tout seul pour faire sa sève élaborée comme n’importe quelle autre plante grâce à ses feuilles qui lui permettent de tirer son énergie du soleil par la photosynthèse.

Les fleurs femelles vont développer des petites baies blanches, translucides et au contenu visqueux, comportant une seule graine, d’où son nom latin « Viscum album ». La dissémination des graines peut s’effectuer par le vent, qui arrache parfois des touffes de gui mais la propagation du gui s’opère principalement par les oiseaux qui consomment les graines et les fruits, notamment la grive draine et la  fauvette à tête noire.

Notez que la fleur du gui est très appréciée des abeilles, d’autant plus que c’est une des toutes premières fleurs de la saison (février). Aux premiers beaux jours, cela bourdonne dans les boules de gui.

Germination et développement du gui

Dès que la température extérieure atteint 10°, la graine collée  à l’arbre va germer. Elle forme une sorte de ventouse qui s’oriente vers l’écorce et au milieu de laquelle se développe un suçoir en forme de clou qui s’enfonce jusqu’au bois neuf de la branche pour atteindre la sève brute.  De petits trous à l’extrémité du suçoir commencent alors à pomper la sève. La plante devient au cours des années de plus en plus invasive, et entre en compétition avec l’arbre et l’épuise.

Lutter contre le gui

Aujourd’hui, l’état de nos vergers  s’est dégradé, bien souvent par vieillissement et abandon de l’entretien. Le gui en a profité pour se développer et sa présence a pour conséquence l’épuisement de nombreux pommiers, qui si rien n’est fait, finiront par disparaître. Et il ne faut que quelques années pour tuer un arbre.

Il faut donc le combattre avec beaucoup d’énergie, en détruisant les jeunes pousses de gui et les touffes, il en va de la sauvegarde de notre patrimoine fruitier.

 

Que faire ?

Tant qu’il y a de la sève, on peut tenter de relancer la végétation par une taille de restauration. Cela fonctionne souvent et donne au pire quelques greffons qui permettent de conserver la variété en regreffant sur des jeunes arbres. L’arrachage pour replantation doit être l’ultime recours.

Comment pratiquer?

Le mieux est de couper toute la branche portant la touffe à une certaine distance au-dessous de l’implantation. Quand il n’est pas possible de procéder ainsi, sur les grosses branches et les troncs, on doit se contenter d’enlever les tiges en les cassant ou les coupant à la base. Mais, de nouvelles pousses naissant sur les cordons sous-corticaux les années suivantes, il faudra périodiquement les supprimer. On peut aussi dans ce cas, emballer la grosse branche nettoyée de son gui d’un plastique noir qui bloquera l’accès à la lumière dont a besoin le gui pour se développer.

Si l’arbre est particulièrement envahi, procédez à cette taille de restauration sur 2 à 3 ans. Si vous y allez trop vite, l’arbre peut ne pas s’en remettre et se « noyer dans sa sève ». L’arbre va réagir en produisant de nouveaux rameaux et gourmands. En deuxième année, sélectionner les jeunes rameaux les mieux orientés, et éliminer les 2/3 des gourmands. Continuer à éliminer les branches parasitées.

Lors de cette taille, profitez-en  pour couper les branches cassées, abîmées et partant en dessous du point de la greffe… Supprimer les branches qui partent d’un côté pour se développer de l’autre côté de l’arbre (pas de croisements dans l’arbre) ainsi que les branches qui retombent les unes sur les autres.

Dégager le cœur de l’arbre et équilibrer la répartition des rameaux afin de laisser suffisamment d’espace entre les branches pour une bonne circulation d’air et une pénétration importante de la lumière. Un oiseau doit pouvoir passer à travers. Evacuer et détruire tout le branchage parasité.

Dans tous les cas, il n‘est pas surprenant que l’on retire jusqu’aux 2/3 du volume des branches

Où couper?

On coupe la branche soit à sa base, soit à l’intersection d’une autre branche. Ne tailler jamais  au milieu des rameaux.

Vergers en restauration dans le Nord Meusien

Les associations des croqueurs de pommes qui ont pour mission la sauvegarde du patrimoine fruitier sont préoccupés par ce parasitisme qui ne cesse de progresser. Des séances de taille de gui sont régulièrement organisées par les antennes départementales. En adhérent à l’association, vous serez tenu informés des activités et pourrez apporter votre petite contribution à ce combat que nous devons gagner.

Cette année, je suis intervenu sur quelques vergers parasités dans le Nord Meusien. Dans la plupart des cas, on peut les sauver mais ce sont des arbres en fin de vie, et il urgent de replanter dès à présent entre les vieux arbres. Dès que les jeunes arbres seront entrés en production, on pourra alors éliminer les arbres devenus trop faibles ou faiblement productifs.

Thierry Heins